« C’était mieux avant ! ». Qui n’a jamais utilisé ou entendu cette expression au détour d’une discussion ? Qu’est ce qui était réellement mieux avant ? Que le client ne puisse pas joindre son commercial à toute heure de la journée pour passer une commande car le téléphone portable n’existait pas ? À moins que ce ne soit les commandes qu’il fallait envoyer par voie postale ? Était-ce mieux ou simplement différent ? À vous de juger !

Témoignage de Bernard Becchetti, ancien vendeur et chef des ventes à la retraite et Sabrina Fischer, vendeuse en activité !

En quelques mots, votre parcours au sein de Würth France ?

Bernard Becchetti : A mes débuts, nous étions une soixantaine de personnes dont une quarantaine de vendeurs. Pendant deux ans, j’ai opéré dans différents secteurs supports : échantillonnage, confection de plaquettes sur support en bois, aménagement de véhicules pour les vendeurs, prise de commande par téléphone, cardex (gestion des stocks) et développement de l’outillage Stahlwille. Je suis entré dans la force de vente en 1975 : les divisions n’existaient pas et nous pouvions visiter tous les clients. Nous étions spécialisés dans la visserie boulonnerie qui était d’ailleurs le logo de l’époque. En 1983, j’ai été nommé chef de région (aujourd’hui chef des ventes) pour la division APME (artisans petites et moyennes entreprises). C’était les débuts de la divisionalisation avec d’une part les roulants (garages VL et PL, travaux publics, transport, machines agricoles) et d’autre part les APME. Plus tard, nous nous sommes encore spécialisés et je suis devenu chef de région Bois. J’ai également assuré la formation des jeunes vendeurs lors de leur stage au siège, et ce jusqu’à la création du poste de formateur. Les dernières années chez Würth, je les ai passées aux côtés d’Alain Haerty, alors Directeur de la division Bois en tant que chargé de mission.

Sabrina Fischer : Je suis vendeuse division Métal depuis 2 ans dans le Haut-Rhin !

Votre véhicule de société ?

B.B. : Une Peugeot 204 break blanche ! Il fallait enclencher la manette de préchauffage starter pour pouvoir démarrer le véhicule ! Elle possédait un aménagement spécial du coffre pour accueillir des caissons sur rails où étaient fixés des échantillons (outillage, disque à tronçonner, à meuler et autres…), y étaient exposés aussi toutes sortes de boites d’assortiments (rondelles, joints, cosses à sertir, fusibles…) et notre grosse malle avec les plaquettes d’échantillonnage de différents produits. Elle était bien trop lourde pour pouvoir être sortie de la voiture alors c’est le client qui venait à elle !

S.F. : Une Peugeot C3 avec tous les équipements actuels.

Vos outils de vente ?

B.B. : Le tout premier catalogue général a vu le jour en 1975 : c’était simplement une centaine de pages A4 reliées par des spirales. C’est Jean Bazier qui a été missionné pour sa mise en page et l’édition a été réalisée au sein même de l’imprimerie Würth France gérée par Georgette Fortez !

S.F. : La tablette ne me quitte plus ! Catalogue de vente, promotions, dossier clients, commandes…tout est informatisé donc à portée de main grâce à la tablette ! Les clients sont toujours amateurs des versions papier c’est pourquoi j’emporte systématiquement le catalogue général clients Würth France. Et dans les cas où je n’ai pas de réseau c’est le catalogue vendeurs qui prend le relais. Les échantillons sont toujours des outils de vente très efficaces !

Les commandes ?

B.B. : J’avais la chance d’habiter Erstein… Tous les matins, je déposais mes commandes au siège avant de me rendre sur mon secteur. Mais les vendeurs des autres régions envoyaient leurs commandes par voie postale ! Imaginez le temps perdu entre le moment où le client signait sa commande et la réception de celle-ci ? Il n’était pas rare que les produits soient réceptionnés plus d’une semaine après transfert de la commande. Totalement impensable aujourd’hui ! C’est seulement dans les années 80, qu’est apparu MSI, un appareil électronique à relier au téléphone fixe qui permettait de passer les commandes le soir même. Et enfin, le minitel qui a complètement disparu à la fin des années 2000.

S.F. : Il y a deux ans, j’ai encore connu le PDA (ordinateur de poche avec des fonctionnalités réseau). Je me souviens qu’un client avait souri parce que nous utilisions encore ce fossile, quand les concurrents travaillaient déjà avec une tablette. Depuis Würth France s’est modernisée et nous a équipés de tablettes. Les commandes sont envoyées en temps réel ! Pour des questions légales, je fais toujours signer le bon de commande par le client.

Les autres canaux de vente ?

B.B. : Je n’ai pas connu les magasins quand j’étais dans la force de vente. Nous avions uniquement un comptoir clients au siège à Erstein : soit ils téléphonaient, soit ils se rendaient directement au comptoir pour passer et récupérer leurs commandes. En quelque sorte, c’était les débuts des magasins…

S.F. : Pour les dépannages, mes clients se rendent dans les magasins. Pour certaines commandes de réapprovisionnement, ils utilisent l’e-shop.

Les produits ?

B.B. : Je vendais essentiellement de la visserie boulonnerie, un peu d’outillage, quelques produits chimiques et divers coffrets d’assortiments.

S.F. : Tous les 30 000 produits sans exception !

Les visites clientèle ?

B.B. : L’objectif c’était 12 visites par jour mais c’était très difficile à réaliser, même si nous n’étions pas perturbés par les mails et les appels. En général, les horaires privilégiés pour voir les clients étaient tôt le matin et tard le soir ! Les moyens de communication étaient limités, on était bien obligé d’aller voir les clients, un bon moyen pour développer une relation de proximité.

S.F. :12 visites ? Je tourne à 9 visites par jour, et encore ce sont de grosses journées ! Nous avons nos habitudes avec les clients. Certains je les visite chaque semaine, d’autres toutes les deux semaines. La plupart du temps, nous définissons la fréquence de ces rencontres au début de notre partenariat. Après, certains de mes rendez-vous sont plus stratégiques que d’autres. Par exemple, quand je sais que certains concurrents vont passer chez mes clients dans la semaine, je m’arrange pour les voir le lundi !

Le relationnel clients ?

B.B. : On respectait beaucoup la vision de Monsieur Würth concernant l’image du vendeur : serrer la main du client, discussion sincère, les yeux dans les yeux… Le relationnel était très important ! Et le port de la cravate était obligatoire !

S.F. : Le relationnel avec les clients existe toujours et est toujours aussi important. À mon sens, il faut juste plus de temps pour y arriver ! Cependant, j’ai pu constater quelques différences. Les clients, dont l’ancienneté dans le métier est plus importante, préfèrent les faces à faces. En revanche, les nouveaux artisans y sont moins sensibles et utilisent plus facilement les nouvelles technologies.

Une anecdote avec vos clients ?

B.B. : Je me rappelle ma première visite chez mon tout premier client. Je m’y étais rendu sans savoir ce qui m’attendait. Quelle erreur ! En arrivant dans son magasin, à peine avais-je dit que je travaillais pour Würth que le client avait saisi un maillet et m’avait menacé. Je suis bien évidemment parti en courant ! Ce ne fut qu’après que j’en compris la raison : un souvenir amer laissé par mon prédécesseur. Mais je n’ai pas voulu en rester là. 8 jours plus tard, j’ai pris mon courage à deux mains et j’y suis retourné : l’accueil fut moins dramatique. Puis petit à petit, j’ai réussi à rétablir la relation entre le client et Würth pour qu’il devienne finalement l’un de mes meilleurs clients !

S.F. : Mon anecdote est moins rocambolesque. C’était lors d’une de mes tournées à Munster. Il pleuvait des cordes et je venais de sortir de chez un client. Garée et à l’abri dans ma voiture, je finalisais ma commande, quand une voiture s’est arrêtée à côté de moi. Le conducteur a ouvert sa fenêtre et la discussion s’est engagée. Résultat : Würth a gagné un nouveau client ce jour-là. Pour le clin d’œil, lors de ma première visite dans son atelier, j’avais ramené au client un parapluie.

Le relationnel interne ?

B.B. : La structure était plus petite donc plus familiale : on pouvait remonter facilement des infos et faire évoluer les choses. On avait une liberté de manœuvre assez importante…

S.F. : La règle, c’est la règle. Mais tout n’est pas figé : bien que notre catalogue de produits soit assez riche, on peut proposer le développement de nouveaux produits au marketing. 🙂

En conclusion, le même métier ?

B.B et S.F. : Dans ce travail, le plus important c’est le relationnel avec les clients. Pour cela, il faut faire preuve de sérieux et de régularité, être à l’écoute pour établir une vraie relation de confiance. De tout temps, le contact humain avec le client est primordial ! Ce qui change vraiment ce sont les outils et les moyens !

 Le mot de la fin ?

B.B. : Aujourd’hui, tout va beaucoup plus vite !

S.F. : Finalement, je voyage léger !